vendredi, avril 19, 2013

Renaissance d'un joyau parisien



Edifié en 1981, fermé depuis 1983, le Louxor a enfin retrouvé son lustre d'antan. Au pied du métro Barbès-Rochechouart, à cheval entre les 9e, 10e et le 18e arrondissements de Paris, ce magnifique cinéma a réouvert ses portes au grand public le jeudi 18 avril 2013. 

D'inspiration art déco néo-égyptien, comme c'était la mode à l'époque, le Louxor n'etait peut-être pas le premier de son genre, mais il prouve aujourd'hui qu'il est bien l'un des plus beaux. A comparer, le Grauman's Egyptian Theater est certes plus spectaculaire, mais n'a pas le même charme. Grâce à la mairie de Paris et à d'opiniâtres associations de riverains, le Louxor a fait l'objet d'une restauration très soignée, et a même récupéré pour l'occasion deux salles supplémentaires, aux capacités plus réduites, mais pleines de charmes.




La salle principale est composée d'un verrière et de deux balcons. Un écran large, conforme aux attentes des spectateurs modernes, vient se poser devant le petit écran qu'on devine conforme à celui d'origine. Les frises et les sculptures murales ont retrouvé d'éclatantes couleurs, et les curieux ne manquent pas d'admirer l'élégance de ce temple du cinéma qui va se consacrer à la diffusion d'oeuvres d'art et essai, et cela sans publicité !

Jeudi 18h30. Je me fraye un chemin jusqu'au troisième étage. Une petite terrasse permet de siroter une bière en regardant passer ce métro dans lequel j'ai passé tant d'années à me demander pourquoi ce cinéma était fermé et quand est-ce qu'il allait réouvrir.

Le rêve est maintenant exaucé. C'est un petit miracle, qui ne risque pas de se produire pour le fameux Gaumont Palace, à quelques stations de là, bel et bien porté disparu lui.

Mais l'heure de la séance approche, je choisis de me faufiler jusqu'à l'orchestre, le premier étage étant complet. Les lumières s'éteignent, c'est presque dommage ! Mais nous sommes là pour voir un film, et pas n'importe lequel : The Grandmaster, le nouvel opus de Wong Kar-Wai.



Voir un film chinois consacré au kung-fu dans une salle d'inspiration égyptienne, voilà qui est curieux. Surtout quand on sait qu'il s'agit probablement du dernier film tourné avec la pellicule Fujifilm. La société japonaise a prévenu le réalisateur qu'elle cessait toute production vers la fin de la période de trois années qu'a nécessité le tournage du film, et c'est ce qui a décidé Wong Kar-Wai à en rester là.

Au risque de l'emphase, je dirais que comme toute œuvre d'art, The Grandmaster intrigue, élève et sublime notre existence. C'est un film qui donne un sens au cinéma : mouvement horizontal et vertical. Défilement des images et beauté des gestes. Quel meilleur écrin pour cela qu'un cinéma qui renaît de ses cendres ? Tel un Phoenix égyptien retrouvant sa splendeur d'antan.

Le film de Wong Kar-Wai montre deux destins parallèles et leur cheminement dans les arts martiaux. Des vies dédiées à cet art plus grand qu'un art : un mode de vie. Où puissance et grandeur d'âme importent plus que tout. 

On sait le cinéaste hongkongais maître de la saudade. Ses films sont toujours empreints d'une mélancolie dans laquelle se tissent bonheur et regrets. Il le montre une nouvelle fois en utilisant le très beau "Deborah's Theme" de Once Upon A Time In America. Un autre grand film sur une époque révolue. 

Ce qui montre, après Tarantino, à quel point l'oeuvre d'Ennio Morricone hante les cinéastes actuels.


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